Centenaire de la bataille du Chemin des Dames

La Ville de Montpellier célèbre le centenaire de cette bataille et rend hommage aux 45 Montpelliérains tombés sur les pentes du Chemindes Dames.

1917, une année noire entre révolutions et déceptions

Révolutions dans les relations internationales

Février 1917, le renversement du Tsar Nicolas II plonge l'Empire russe dans le chaos et précipite le bouleversement des forces en présence, laissant craindre le rapatriement des troupes allemandes et autrichiennes sur le front de l'Ouest, ce qui sera finalement le cas après la 2e révolution en octobre 1917.

Le 6 avril 1917, les États-Unis, 1ère puissance économique, sortent de leur isolement et entrent en guerre aux côtés de l'Entente. L'impact de cet engagement ne se verra qu'en 1918, le temps que l'armée américaine se crée véritablement et traverse l'Atlantique pour venir se battre avec du matériel, le plus souvent français ou anglais. D'autres pays rejoindront ensuite la Triple-Entente (Panama, Cuba, Grèce, Brésil, Chine).

Au Moyen-Orient, les conquêtes d'Akaba en juin et de Jérusalem en décembre conduiront les Britanniques à faire des promesses contradictoires. Les conséquences sont encore perceptibles aujourd'hui.

Déceptions en politique intérieure

L'instabilité gouvernementale récurrente est un handicap. Alors que la gravité de la situation nécessitait de la constance dans les choix politiques et stratégiques, les Français et les soldats assistent à la valse des présidents du Conseil (4 en 1917), des ministres de la guerre (4), voire des « chefs militaires » sur le terrain.

Par ailleurs, dès le début la guerre, Raymond Poincaré et le gouvernement s'étaient dessaisis d'une grande partie de leurs prérogatives constitutionnelles au profit du haut commandement militaire, lui laissant ainsi la responsabilité de contenir l'envahisseur « coûte que coûte » puis de libérer le pays. En janvier 1917, le politique a repris toutes ses responsabilités et retrouve ses prérogatives, en matière de justice notamment (recours en révision, droit de grâce...)

Révolutions militaires

Essentiellement terrestre, la guerre devient maritime en 1917 et les ports des sites névralgiques qui permettent de ravitailler en hommes, en matériels ou nourritures. L'Allemagne l'a bien compris et répond au blocus maritime infligé par la Grande-Bretagne, en attaquant les navires de commerce avec ses sousmarins.
Si l'armée allemande coulera 2500 navires, rien que cette année là, c'est le Royaume-Uni, avec l'aide des capitaux américains qui gagnera cette bataille de l'Atlantique en organisant des convois pour protéger les navires civils.
En septembre 1916, des chars d'assaut, britanniques, étaient apparus pour la première fois sur le théâtre des opérations lors de la bataille de la Somme. Mais c'est à Berry-au Bac, le 16 avril 1917, que le premier char français sera utilisé. Sans plus de succès que pour les Britanniques en 1916 puisque sur les 128 chars Schneider engagés, 52 sont touchés par l'artillerie ennemie (35 ont pris feu). Et 21 engins sont immobilisés par une panne, qu'elle soit mécanique ou de terrain (enlisement). Il faudra attendre novembre
1917 et la bataille de Cambrai pour que la puissance des blindés se révèle.

Déceptions et extrême lassitude des soldats

1917 est une année terrible sur le plan climatique, avec notamment l'un des hivers les plus froids du XXe siècle. Sur un terrain déjà extrêmement « bouleversé » par près de 3 années de bombardement et d'occupation totale ou partielle pour 10 départements, que la boue et le gel rendent encore plus hostile, l'engagement des forces est de plus en plus compliqué. Il l'est d'autant plus qu'après presque 3 ans de conflit meurtrier, la France est littéralement sonnée. Chaque jour depuis août 1914, ce sont près de 1 000 de ses enfants qui tombent sous le feu ennemi.

1917 ne sera pas l'année la plus meurtrière mais la plus éprouvante. L'espoir de libération porté par la bataille du Chemin des Dames était immense. L'échec et le très grand nombre de pertes dès les 1ers jours de l'offensive n'en seront que plus rudes à supporter
et provoqueront des mutineries au sein de l'armée Cette lassitude et ces mouvements de rébellion se retrouveront dans tous les pays engagés dans le conflit. Seuls ceux de Russie déboucheront sur une révolution.

Malgré cela, les Poilus ont tenu le choc jusqu'en 1918. L'arrivée de milliers de jeunes Américains enthousiastes leur permettra de contenir les ultimes offensives ennemies du printemps pour ramener les Allemands sur la frontière de 1914 puis après l'Armistice sur celle d'avant la guerre de 1870.

Chemin des damesVoir l'image en grand © Shutterstock

Une dernière offensive pour mettre fin à la guerre...

Après trois années de guerre sans issue, l'hécatombe de 1914 (300 000 morts) et l'échec des offensives en Artois et en Champagne (1915) et sur la Somme (1916), le nouveau commandant en chef de l'armée française, le général Nivelle, promet aux dirigeants politiques d'obtenir une victoire décisive sur le front ouest, avant la fin du printemps 1917, en rompant le front « ...d'un seul coup, en 24 ou 48 heures ». Ce sera le 16 avril au Chemin des Dames, dans le département de l'Aisne, avec près d'un million d'hommes engagés et parmi eux, 10 000 tirailleurs sénégalais et 20 000 Russes.

Du 15 au 19 mars 1917, le Grand Quartier Général allemand avait mis en oeuvre l'opération Alberich : un retrait stratégique de la ligne de front entre Arras et Soissons. L'état-major français interprète à tort ce retrait comme une marque de faiblesse et ses services de renseignement ne mesurent pas toute la puissance du nouveau dispositif défensif ennemi. Par ailleurs l'effet de surprise voulu par Nivelle ne se produira pas non plus, les Allemands ayant eu connaissance du lieu précis de l'opération française, dès les 1ers jours d'avril. Pour tromper l'ennemi, Britanniques et Canadiens attaquent le 9 avril sur le secteur Arras-Vimy et les Français le 13 au niveau de Saint Quentin. Dans le même temps, l'artillerie française tire 5 millions d'obus sur les positions allemandes (5 000 canons, 1 tous les 13 mètres). L'engagement des premiers chars d'assaut, des mastodontes d'acier de plus de 7 tonnes, est également prévu dans la plaine au nord de Berry au Bac.

16 avril : l'échec

L'attaque d'infanterie est lancée le 16 avril, par un temps glacial, sur un front de près de 40 km. Ce sera un échec sanglant, sur le Chemin des Dames comme dans la plaine champenoise voisine. Les assauts ne parviennent pas à dépasser la première ligne allemande et se brisent sur des positions allemandes pratiquement intactes. Les Allemands s'étaient, en effet, abrités dans des carrières souterraines, les Creutes (Caverne du dragon). Et les conditions météorologiques n'avaient pas permis aux artilleurs français de faire les réglages nécessaires à la destruction des redoutables nids de mitrailleuses ennemies. Le 16 avril, la météo est une nouvelle fois exécrable (pluie glacée et bourrasques de neige) et éprouvantes pour tous les combattants, notamment les tirailleurs africains, victimes d'engelures et paralysés par le froid. Les premières heures sont particulièrement meurtrières. Certaines unités perdent jusqu'à la moitié de leurs effectifs. À l'échec militaire s'ajoute un désastre sanitaire : les longues colonnes de blessés et d'éclopés qui piétinent dans la boue et qui n'atteindront pas toujours les postes de secours et les hôpitaux d'évacuation.

29 avril : les premières mutineries collectives


L'armée de réserve est engagée pour une relance de l'offensive le 4 mai sur Craonne et le 5 sur Laffaux. Mais cela n'y change rien. Le 15 mai, Nivelle est remplacé par Pétain. Dès le 29 avril, des mutineries éclatent au sein de régiments ayant combattu sur le Chemin des Dames et qui refusent de remonter en ligne. Non pas parce que ces soldats ne veulent plus tenir le front, mais parce qu'ils refusent de nouvelles attaques inutiles. Le gouvernement avait supprimé en avril les conseils de guerre spéciaux à 3
membres crée en 1914 lors de la bataille de la Marne.

Mais à la demande du général Pétain, il suspendra les circonstances atténuantes et les recours en révision de juin à juillet 1917. Dans le même temps, l'accroissement des permissions et l'amélioration des conditions de vie des combattants permirent un retour à la normale dès le mois de septembre 1917. Par la suite, l'armée française combattra sans faillir, jusqu'au bout.

23 octobre : la victoire

La grande offensive suspendue, Pétain mène des opérations limitées en attendant, comme il dit, «les tanks et les Américains». Les combats se poursuivent sur le Chemin des Dames jusqu'à l'automne et 23 octobre, les Français parviennent à s'emparer du fort de la Malmaison, à l'ouest du Chemin des Dames. Entre le 31 octobre et le 1er novembre 1917, les Allemands abandonnent leurs positions sur le Chemin des Dames pour se replier derrière une nouvelle ligne de défense, au nord de l'Ailette.

1917 et le kyste mémoriel des mutineries

Les mutineries, refus collectifs d’obéissance, apparaissent en 1917 dans les armées françaises, mais aussi russes et italiennes. Elles accompagnent d’autres formes de protestation dans la société civile qui témoignent de la lassitude suscitées par la prolongation de la guerre dans des populations déjà endeuillées par d’énormes pertes.

• Il y avait eu avant le printemps des désertions et des refus d’obéissance, même à Verdun. Mais après le Chemin des Dames, les « actes d’indisciplines » se multiplient dans des unités qui doivent repartir au front. On parlera de mutinerie alors même que les officiers ont été très rarement molestés et que les mutins refusent non pas de se battre mais « les boucheries inutiles ».

• Pas nécessairement prêts à accepter une défaite, les mutins refusaient un jusqu’auboutisme qu’ils vivaient comme leur condamnation à mort. Mais loin d’adhérer à un quelconque défaitisme, les mutins ne se sont jamais rendus collectivement à l’ennemi et n’ont pas n’abandonnè les premières lignes.

• Pour enrayer le mouvement et éviter une contagion à l’ensemble des troupes françaises, les conseils de guerre prononceront 3400 condamnations (10 % des mutins) : condamnation à mort, peines de prison, de travaux forcés, renvoi en premières lignes, envoi
arbitraire dans des bagnes ou des unités disciplinaires dans les colonies. Parmi les 500 condamnations à mort, seules 26 d’entre elles seront exécutées.

• Tous les fusillés de la Grande Guerre ne furent pas des mutins et tous les mutins ne furent pas fusillés. Entre 1914 et 1918, 2 500 condamnations à mort ont été prononcées par un conseil de guerre et 741 exécutées.

1914 : 206 fusillés, 1915 : 296, 1916 : 136,
1917 : 89 dont 26 mutins, 1918 : 14.

Hommage aux soldats montpelliérains morts pour la France lors de la bataille du Chemin des Dames, à travers les biographies de cinq d'entre eux

 

Jean, Gédéon DEDOUCHES est né le 2 septembre 1894 à Montpellier. En 1914, il est préparateur en pharmacie à Montpellier. Célibataire, il est incorporé le 1er septembre 1914 au 24e Régiment d'Infanterie à Perpignan. Le 26 mai 1915, il passe au 22e Régiment d'Infanterie. Il est tué à Laffaux le 16 avril 1917.
Son corps revient le 14 juin 1922 et il est inhumé au cimetière Saint Lazare de Montpellier.

Paul, Ernest, Augustin GILLES est né le 5 janvier 1879 à Poitiers. Avant qu'il n'atteigne ses 20 ans, ses parents s'installent à Montpellier. Il est marié avec Marie, Jeanne Gamba. De 1890 à 1899, Il est élève au Lycée. En 1899, il intègre l'école Spéciale de Saint-
Cyr. Le 28 octobre 1899, il s'engage pour 3 ans dans l'armée. Jusqu'en août 1914, il est affecté en Afrique. Le 1er avril 1916, il est capitaine au 51e Bataillon de Tirailleur Sénégalais. Le 16 avril 1917, il est tué à la Vallée-Foulon dans l'Aisne.
Son corps ne sera jamais retrouvé. Il est fait Chevalier de la Légion d'Honneur et reçoit la Croix de Guerre avec palme avec citation « Officier remarquable par son calme, son allant, son énergie. Agent de liaison auprès du Colonel commandant le groupement,
s'est porté jusqu'aux éléments les plus avancés sous le feu très violent de l'artillerie et des mitrailleuses ennemies pour renseigner le commandement sur la situation. A été mortellement blessé au cours de cette reconnaissance ».

Justin POILPRE est né le 7 avril 1887 à Pignan. En 1914, il est ouvrier dans une carrière. Il est mobilisé le 1er août 1914 comme soldat au 8e régiment d'infanterie coloniale. Le 11 novembre 1916, il intègre le 24e régiment d'infanterie coloniale. Il est tué à
l'ennemi le 16 avril 1917 à Laffaux. Il est inhumé dans la nécropole nationale d'Amblény.

Antoine Clarpon MAZE est né le 13 avril 1878 à Grignols en Dordogne. Il est marié avec Madeleine Pellegrin et ils habitaient au 6 de la rue François Perier à Montpellier. Ses parents sont Antoine Maze et Jeanne Guibert. Il est mobilisé le premier août 1914 au 93e RI. Il arrive sur le front le 20 janvier 1916 ; il est blessé le 23 juillet 1916 au cours de la bataille de la Somme, d'un éclat d'obus dans la cuisse droite. Le 3 janvier 1917, il est incorporé au 233e RI. Il disparaît à Craonne  le 16 avril 1917.

Marcel, Michel RAMBAL est né le 2 Octobre 1896 à Montpellier. Il mesurait 1m68. Il a épousé Émilie Rambal et était plâtrier de profession. Ses parents sont Léon et Germaine. Il habitait 7 rue d'Alsace à Montpellier. Il est incorporé le 12 avril 1915 au 16e régiment d'infanterie. Il est tué à l'ennemi le 16 avril 1917 au Bastion de Chevreux dans l'Aisne et Il a été enterré à la nécropole nationale de Craonnelle

(Biographies écrites par les élèves de CM2 de l’école St Charles dans le cadre d’un projet pédagogique avec l’ONAC)

 Chemin des dames_2Voir l'image en grand © Shutterstock

LE SAVIEZ-VOUS ?

L'origine du nom « Le Chemin des Dames »

 Tranchée du blaconVoir l'image en grand © Bruno Regue Tranchée du blacon - Plateau Californie

Les filles de Louis XV, Marie-Adélaïde et Victoire, appelées également «Mesdames de France», empruntaient cette « route » pour se rendre au Château de la Bove, près de Bouconville-Vauclair, chez la Comtesse de Narbonne, leur gouvernante.
Pour faciliter le passage du carrosse royal, elles auraient obtenu que le mauvais chemin du plateau soit pavé. Elles lui ont laissé son nom : Chemin des Dames.

Le Chemin des Dames, un haut lieu de bataille depuis l'Antiquité

57 av Jésus Christ : les légions de Jules César affrontent les troupes de la Gaule Belgique lors de la 1ère bataille de l'Aisne

• 596 : Bataille de Laffaux qui opposa le royaume de Neustrie à celui d'Austrasie

7 mars 1814 : Napoléon Ier livre bataille contre l'armée prussienne de Blücher lors de la bataille dite de Craonne

Après la guerre de 1870, les forts de la Malmaison et de Condé seront construits (2e ligne de défense de Paris)

1914 : Après la bataille de la Marne qu'ils ont perdue, les Allemands y ont trouvé refuge pour repousser les attaques françaises et britanniques

16 avril 1917 : Bataille du Chemin des Dames qui marquera les esprits pour la crise de confiance qu'elle provoquera au sein de l'armée française. Elle prendra fin le 23 octobre avec la victoire française à la Malmaison.

27 mai 1918, le général en chef des armées allemandes Ludendorff attaque à nouveau au Chemin des Dames. La victoire sera pour eux cette fois

Mai - juin 1940 : Le Chemin des Dames est à nouveau le théâtre d'affrontements sanglants entre l'armée française et l'armée allemande

 

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